L’usage de matériaux biosourcés en habitat participatif : retour d’expérience du Penjat à Auch
Le Penjat, ancienne ferme gasconne à Auch dans le Gers, a été réhabilité en habitat participatif entre début 2020 et juillet 2021. Aujourd’hui, six foyers y vivent autour de communs. La conservation du patrimoine bâti existant, et l'emploi de matériaux biosourcés a guidé les choix techniques du groupe d'habitants dès le début du projet. Le chantier a été confié à 90% à des entreprises locales. Cette rénovation complète a été lauréate en 2021 de l'Appel à projet du OFF du développement durable.
Par Jérôme Gorisse, habitant du Penjat
D'abord, la force du collectif
« Notre envie est de créer un lieu de vie, d’habitat et de travail, autour des valeurs de convivialité, de partage, de solidarité, d’ouverture au monde, d’accueil et de création.
Nous souhaitons poursuivre et développer un mode de vie écologique, économe, avec une large part aux moyens collectifs. Nous pouvons, sur ce lieu, produire une part significative des ressources nécessaires en énergie (électricité, solaire ou autre).
Et surtout, nous avons envie de nous marrer et de bien vivre ensemble. »
Cet extrait de la charte des valeurs du Penjat, rédigée dès février 2018, par le groupe d’habitants fixe un objectif qui sera respecté tout au long du chantier.
Tout commence donc avec la charte des valeurs commune. Pour tenir un cap et se fixer des objectifs en matière de développement durable de la réhabilitation, le groupe choisit de s’inscrire dans la démarche « Bâtiments Durables en Occitanie » (BDO), « outil pédagogique d’accompagnement et d’évaluation sur les aspects environnementaux, économiques et sociaux, pour construire ou rénover son bâtiment en zone urbaine, péri-urbaine ou rurale, dans un contexte adapté à toutes les spécificités de la région Occitanie ».
Du bois, encore du bois et zéro bitume
Le chantier du Penjat a affiché une absence complète de bitume, aucune étanchéité nouvelle des sols, aucune bombe de mousse polyuréthane, quasi-absence de polystyrène (sauf au sein de la chaudière), très peu de joints silicone, quasi-absence de béton et ciment (à l’exception d’un renfort ponctuel de fondation). Le chantier du Penjat a fièrement et massivement mis en œuvre les matériaux biosourcés :
- Charpente bois, isolation thermique extérieure laine de bois et panneaux de bois rigide ;
- Isolation en fibre soufflée ouate de cellulose de type Ouatteco nature ou panneaux de laine de bois Biofib trio ;
- Volige de peuplier (Landes) en rampants apparents et menuiseries intérieures et extérieures en bois (mélèze et frêne), plancher bois massif (chêne) ou contrecollé ;
- Maçonnerie en pierre, issue des déconstructions, ou à ossature bois ;
- Couverture en terre cuite locale, terre cuite au sol au rez-de-chaussée ;
- Peintures naturelles ;
- Enduits intérieurs en terre et chaux et enduits à la chaux/sable régionaux pour le ravalement de façades.
La récupération systématique des matériaux par les habitants a par ailleurs permis un chantier avec zéro benne de déchets.
Une innovation a été également mise en place avec l’installation de WC secs « sans eau, sans sciure » dans tous les appartements. Un prototype cuvette en bois des WC secs en séparation d’urine, avec sortie du seau inox devant, sur tiroir, a été conçu par un écocentre et un menuisier. Le résultat réalisé est probant, avec un fonctionnement sans odeur. La quasi-absence de consommation d‘eau est confirmée puisqu’un verre d’eau par usage suffit pour éviter les dépôts d’urée, et non des litres de chasse d’eau. L’évacuation du seau reste simple et sans problème au bout de 2 ans d’usage, avec une vidange environ toutes les 3 à 5 semaines dans un compost dédié.
La maîtrise du budget et du coût des travaux
Le budget global de l’opération immobilière a été contenu dans les objectifs fixés initialement (1,4 million d’euros) sans rien renier des ambitions d’isolation, d’innovations et de démarche participative. A la fin de l'opération, la variation du coût est de l’ordre de +0,5% des objectifs. Cette maîtrise du budget a permis l’accession à la propriété de quatre foyers non imposables, comme souhaité.
Plusieurs facteurs expliquent la réussite de cet objectif décisif :
- la conduite des études, l’intégration en amont d’un thermicien, la conception dense, pour utiliser tous les m² disponibles dans le volume bâti existant ;
- la négociation des devis par l’architecte, avec exclusivement des entreprises locales expérimentées en bâti ancien ;
- le coût des travaux par les entreprises, bien maîtrisé par la maîtrise d’œuvre, et leur rapidité d’exécution, avec un délai tenu ;
- la réactivité de la maîtrise d’ouvrage en phase chantier (réponse en 48h à toutes les questions) ;
- l’apport financier personnel de chaque foyer, permettant une trésorerie solide et l'absence de frais financiers ;
- la diversité du groupe d’habitant.es, alors capable de répondre à la multiplicité des questions à traiter pendant les trois années du projet immobilier et la participation des habitant.es aux travaux (env. 10%, sur les démolitions, espaces communs et extérieurs)
- et... la chance de finir le chantier juste avant l'inflation des prix des matériaux en 2021 !
Le « surcoût » des matériaux bios-sourcés n'a pas été précisément évalué, compte tenu du choix initial d'y recourir. En revanche, la démarche « Bâtiments Durables en Occitanie » et la subvention NOWATT du Conseil Régional Occitanie ont permis un cofinancement important, d'un montant d'environ 11% du coût global.
Pour aller plus loin :
- Le site d'EnviroBat Occitanie
- Le site OFF a pour objectif de valoriser des ouvrages low-tech, frugaux et participatifs)
- Et bien sûr, le site du Penjat, à Auch
- Le site d'EnviroBat Occitanie
- Le site OFF a pour objectif de valoriser des ouvrages low-tech, frugaux et participatifs)
- Et bien sûr, le site du Penjat, à Auch
Informations utiles
Contact : contact@habitatparticipatif-france.fr