Tribulations d’un groupe d’habitants en quête de foncier en Ile-de-France

28.07.2023

Dominique est membre (très) active d’Habitat Participatif France depuis sa fondation. Elle est par ailleurs une militante passionnée de l’habitat participatif et particulièrement des coopératives d’habitant.e.s à Paris et en Ile-de-France. À la capitale, et surement plus qu’ailleurs en France, la recherche de foncier et le montage de projets d’habitats participatifs peut demander une sacrée dose de courage et de persévérance. Dominique a participé au montage de trois projets d’habitats participatifs, le premier ayant été finaliste d’un appel à projets de la Ville de Paris en 2014. Elle revient sur son parcours dans ce billet.

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Par Dominique Jaulmes, médecin retraitée, future habitante et militante pour l’Habitat Participatif au sein d’Habitat Participatif France et Coop et Toits

Vous vous souvenez peut-être de l’histoire du groupe d’habitants de la « Caravane », un groupe ayant répondu en 2014 à l’appel à projets de la Ville de Paris pour la construction de trois habitats participatifs… « Caravane », un merveilleux projet de vie dont le jury de l’appel à projets avait sur le moment loué la qualité. Ce projet de coopérative d’habitants fut finalement gentiment éconduit du concours.

Sur les 14 foyers « rescapés » du projet de la « Caravane », 11 se sont finalement orientés sur d’autres voies immobilières, quittant celle du projet de coopérative d’habitants dont ils avaient rêvé et sur lequel ils avaient travaillé dur pendant plus d’un an et demi. Parmi eux le couple de Sylvie et Jo, et deux amies, Carmen et Dominique, se sont cependant retrouvé.e.s autour d’un second rêve quelques années plus tard ! Tenace, le couple cherchait toujours désespérément un lieu. Il fut séduit par un petit pavillon de banlieue à Montreuil, entouré de ses 750 m2 de jardin, à vendre à deux pas de chez eux. Une rapide étude de faisabilité démontra que pouvaient s’y construire une dizaine de logements (avec des surfaces privées de 35m2 à 70m2 max).

Le couple prévient tout de suite les deux autres personnes, qui elles aussi cherchaient toujours à rejoindre ou monter un habitat participatif. Sans hésiter le « groupe des quatre » signe rapidement un compromis de vente avec les propriétaires, abondant un séquestre en bonne et due forme chez le notaire du vendeur - première erreur -. Nous acceptons à ce moment crucial, une clause stipulant une lettre de caution d’une banque – seconde erreur – oubliant, par la même occasion, la clause de permis de construire – troisième erreur ! -. Tout feu tout flamme, nous intégrons rapidement au projet cinq nouveaux foyers. Nous activons alors nos anciens réseaux : bailleurs, promoteurs, banques et surtout accompagnatrices de projet d’habitat participatif, que nous contactons sans pour autant les retenir ! Quatrième erreur…

Pendant cinq mois, nous nous activons, et multiplions les allers-retours entre les banquiers, les bailleurs et promoteurs. Nous mettons toute notre énergie pour faire sortir de terre notre projet de coopérative d’habitants, que nous souhaitions en mixité sociale. Le propriétaire prolonge le délai d’obtention de la caution bancaire pendant deux mois, pour nous laisser du temps. À noter cependant que nous pouvions financer la presque totalité du projet par la vente des biens des membres du groupe qui étaient propriétaires. La municipalité était, elle aussi séduite, par notre projet (…néanmoins pas au point d’acheter le foncier pour proposer une dissociation et rassurer ainsi la banque). Finalement, quasiment tous les feux étaient au vert !

Nous trouvons alors un bailleur social qui « fait dans la dentelle » et sait construire des logements sociaux en diffus, mais pas en habitat participatif. Nous retournons vers le banquier, qui nous fait confiance mais accepte seulement de défendre un projet de SCIA avec le bailleur. Nous abandonnons alors notre rêve de coopérative d’habitants loi Alur, qui n’inspirait pas confiance au banquier : pour nous, c’est avant tout le projet de vie intergénérationnel et à forte mixité sociale qui nous importe, plus que le montage juridique sur lequel nous acceptons de faire un sacrifice.

À ce moment précis du projet, nous avions réuni les conditions imposées par le vendeur. L’aboutissement de la vente était proche… C’était sans compter que ce dernier trouva finalement que notre montage était trop long. Si près du but, le notaire du vendeur nous fit savoir qu’il arrêtait là le compromis et nous rendait notre argent ! Moins ses honoraires bien sûr… Nous avons également perdu les honoraires de l’étude de faisabilité effectuée par une amie architecte et une journée de formation par notre amie accompagnatrice (mais là aucun regret car ces formations sont de belles pépites !).

Ami.e.s futur.e.s habitant.e.s, quelques leçons à retenir de ces deux projets :

- Dès le début d’un projet, vous faire accompagner par un.e professionnel.le de l’Habitat Participatif. Nous serions sans doute arrivé.e.s plus rapidement au but et n’aurions peut-être pas signé cette caution bancaire ; nous aurions aussi probablement ajouté un de nos notaires et inclus une clause d’obtention de permis de construire.

- En second lieu n’hésitez pas à changer de région ! L’absence de foncier, le prix du foncier disponible, et le soutien timide des collectivités territoriales franciliennes, rendent les projets bien plus ardus !

Pour ma part je me donne la fin de la mandature des municipales pour tenter encore une recherche de foncier à Paris. Encore deux ans et demi pour convaincre nos élus que la mixité sociale dans l’habitat contribue à l’insertion par le logement.

Pour aller plus loin :


- Sur les coopératives d’habitants : https://www.habicoop.fr/
- L'association francilienne Coop et Toits : https://coop-et-toits.fr/

- Télécharger « Les clés de l’Habitat Participatif » sur les montages juridiques.

- Le site de CAHP IDF Pour découvrir l’habitat participatif à Paris et en Île-de-France.


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Ce texte a été publié dans le "Fil des communs", newsletter d'Habitat Participatif France, dédiée aux habitant.e.s et futur.e.s habitant.e.s en habitat participatif.
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